Le malheur d'Henriette Gérard

Henriette Gérard, fille d’un riche propriétaire agricole, a reçu une éducation au-dessus de sa condition, et se désole de la mesquinerie de sa famille.
La première moitié du roman raconte son idylle avec Émile, jeune employé de bureau rêveur rencontré au bal, et leurs rendez-vous clandestines dans le parc de la demeure d’Henriette.
La deuxième est consacrée à la contre-attaque de la famille et à la cour assidue du vieux et riche Mathéus, à laquelle Henriette cède de guerre lasse pour gagner son indépendance.
Ce roman est intéressant comme expérience d’un récit naturaliste écrit dans une langue proche de la conversation, avec des personnages moins conventionnels que ceux du romantisme. Henriette n’est pas une oie blanche confite en dévotion, mais une jeune fille qui pourrait exister dans la vie réelle.
Duranty (1833-1880), critique et romancier, définissait ainsi le réalisme, mouvement artistique développé depuis les années 1850 par Courbet et Champfleury : « Le Réalisme conclut à la reproduction exacte, complète, sincère, du milieu social de l’époque où l’on vit, parce qu’une telle direction d’études est justifiée par la raison, les besoins de l’intelligence et l’intérêt du public et qu’elle est exempte de tout mensonge, de toute tricherie. Cette reproduction doit être aussi simple que possible pour être compréhensible à tout le monde. » Ses deux principaux romans, Le Malheur d’Henriette Gérard et La Cause du Beau Guillaume (1862) se veulent dans leur forme et leur écriture en réaction contre le romantisme régnant. Aucune concession aux goûts du public dans son écriture dépouillée, ses notations pénétrantes sur les comportements de personnages placés dans des milieux sociaux hostiles. Écrivain peu compris de son temps, Duranty n’est pas beaucoup mieux connu aujourd’hui.